Constellations de scénarios

Tu es l’inventeur d’une méthode particulière d’accompagnement à l’écriture de scénarios grâce à un outil que tu nommes : constellation scénarique. C’est quoi au juste? Et à quoi ça sert ? Cela sert à faire que le film ait plus de chances de marcher, en faisant en sorte que le scénario « parle » à l’inconscient du spectateur. C’est une notion difficile à expliciter et pourtant elle est essentielle. Il y a un cheminement inconscient qui traverse l’histoire, une logique sous jacente qui rend crédible les réactions des personnages, et qui amène le rythme au déroulé de la narration. Cette une logique subtile et particulière qui doit être fluide, car s’il y a des ruptures ou des incohérences le spectateur décroche, et n’arrive pas réellement à rentrer dans l’histoire, le film ne le touche pas. Ceux qui sont habitués à lire des scénarios sentent cela, ils perçoivent que quelques chose ne va pas, sans réussir ni à identifier précisément le problème ni à y remédier de façon certaine. Il n’y a pas de règles universelles qui régissent la cohérence de ce mécanisme inconscient, et chaque histoire, chaque scénariste a sa propre logique qui n’a rien à voir avec la vraisemblance de l’histoire. C’est pour cela que j’ai adapté l’outil des constellations familiales de Bert Hellinger, pour pouvoir mettre en exergue cette dimension inconsciente et la travailler.

Comment cela se passe ? Cela se déroule avec un groupe de personnes choisies par le réalisateur ou le producteur. Les participants incarnent successivement les différents éléments signifiants du scénario. Ils vont servir de révélateurs de la dynamique inconsciente qui traverse le script. C’est très étonnant, le scénariste place debout les participants qu’il choisi, et leur dit juste ce qu’ils représentent, ils peuvent même ne pas du tout connaître l’histoire et pourtant ils vont ressentir des émotions, des sensations physiques, et ainsi devenir les porte parole de ce qu’ils incarnent ou plus exactement de l’inconscient de celui qui les a positionnés. Mon travail consiste alors à décrypter ce qui chez eux émerge sans qu’ils en soient pleinement conscients. Je mets en évidence cette « mécanique des fluides », et fait en sorte qu’elle fonctionne au mieux, afin que le spectateur potentiel puisse adhérer à l’histoire. Nous commençons généralement par une sorte de filage du film, en faisant rentrer au fur et à mesure les différents éléments signifiants du script. C’est à dire les personnages clés, mais aussi des notions signifiantes comme par exemple, le secret, la guerre, le passé ou même le décor. C’est en bougeant les représentants ou en leur proposant de dire une phrase particulière ou encore en amenant un autre protagoniste que l’on découvre la solution pour qu’à nouveau le mouvement reprenne. Ma participation s’arrête là, ensuite l’auteur retourne à son écriture avec une série d’informations qui lui permettent de modifier son script comme il le souhaite, je n’interviens pas du tout sur l’écriture.